
@allure @aliciakeys
Porté par l’auteure britannique Zadie Smith, l’interprète, compositrice et pianiste américaine Alicia Keys ou encore Erykah Badu, la reine de la neo soul, et tant d’autres, le fichu fait basculer la République. Tout ce qui est propre au style d’une personne racisée est sujet à débat, c’est agaçant. Le cas Danièle Obono est un exemple flagrant des limites de la compréhension de cette réalité de la mondialisation par une frange de la société censée être plus cultivée que la masse. La députée avait-elle besoin d’une permission parlementaire pour exprimer sa culture d’origine dans les instances publiques ? Pourquoi la France a-t-elle du mal à mettre son idée de multiculturalisme niais et hypocrite en pratique ? Je n’arrive pas à imaginer qu’un bout de tissu dans l’hémicycle puisse être au centre de nombreuses controverses et polémiques. Personnellement, je ne porte que rarement le turban, le foulard ou encore le fichu pour des raisons qui sont les miennes mais j’aime comment un objet dit d’oppression, de soumission, de pauvreté et de négligence peut être détourné au fil du temps et ainsi devenir une parure voire une couronne. A travers l’histoire et en fonction de l’emplacement géographique, il a été tant de choses. Tantôt accessoire de subordination de la femme dont on ne voulait pas voir les cheveux grainés découverts, de l’esclave qui risque d’attirer le maître. Oui, de celle qui risque d’être, au fond, à égalité avec la maîtresse alors qu’en Afrique de l’ouest, il exprime la grandeur et l’élégance. Aujourd’hui, il affirme une posture individuelle, la volonté de se montrer au monde tel qu’on le souhaite. Alors, le voir au parlement arboré par Danièle Obono, une députée d’origine gabonaise qui n’a pas la langue dans sa poche et qui fait fi des commentaires racistes à son égard, le détournement prend alors un sens merveilleux parce qu’il est tout cela à la fois. En nouant son foulard à « l’africaine » devant les hauts dignitaires de l’état, la députée de la France Insoumise manifeste son indépendance politique et vestimentaire, sa grandeur mais également le fait qu’elle est sur un même pied d’égalité avec ses pairs. Le turban est un objet esthétique, religieux ou non, africain ou pas, un moyen de protection contre les intempéries pour les unes ou un moyen de séduction pour les autres, dans tous les cas, il synthétise des expressions et des significations qui diffèrent d’un individu à l’autre.